vendredi 22 août 2008

Emploi des jeunes


93ème Conférence internationale du travail


Une des questions à l’ordre du jour de la 93ème Conférence internationale de l’OIT qui s’est tenue à Genève du 31 mai au 16 juin 2005, portait sur "La promotion de l’emploi des jeunes (discussion générale fondée sur une approche intégrée). A l’appui de cette discussion le BIT avait préparé un rapport intitulé : L’emploi des jeunes : les voies d’accès à un travail décent. Dans son discours d’ouverture, le président de la Commission de l’emploi des jeunes, M. M.L. Abdelmoumene, a souligné "l’intérêt grandissant que la communauté internationale porte à l’emploi des jeunes, comme le prouvent la mise en place par le Secrétaire général des Nations Unies du Réseau pour l’emploi des jeunes, la récente adoption par l’Assemblée générale des Nations de la résolution relative à la promotion de l’emploi des jeunes, ainsi que la mention explicite de la création d’emplois décents et productifs pour les jeunes, hommes et femmes, dans les objectifs du Millénaire pour le développement que les Nations Unies se sont données. [1]"

Dans le cours de la discussion du rapport en Commission ainsi qu’en plénière, "La JOCI et le Mouvement Mondial des Travailleurs Chrétiens (MMTC) ont fait une déclaration conjointe sur la vulnérabilité des jeunes travailleurs et la nécessité de voir les gouvernements, les travailleurs et les employeurs, chacun dans son rôle, favoriser l’emploi décent et durable de par leur adhésion aux principes du travail décent.[2]".

Parallèlement à sa participation à cette discussion sur le travail des jeunes, la JOCI a animé, à la Maison des Associations à Genève, conjointement avec un représentant de la Confédération Mondiale du Travail (CMT), un débat sur le thème "Quel avenir pour le travail ? Quel avenir pour les jeunes ?"

Enfin, pendant toute la durée de la Conférence internationale du Travail, la JOCI avait monté une exposition sur le travail qu’elle mène dans 50 pays face à la réalité du chômage, du travail informel, du travail temporaire et précaire des jeunes et face aux situations spécifiques des jeunes travailleurs.

A Genève, la JOCI était représentée par son président, Thiruvalluvar Yovel (Inde), sa secrétaire générale Anna Cirocco (Australie), son assistant ecclésiastique, P. José Reginaldo Andrietta (Brésil) ainsi que par les délégués JOCI du Ghana et des Philippines.

[1] ILC 93-CEJ-DI77-2005-06-0013-36-Fr.doc, par.6
[2] ILC 93-CEJ-DI77-2005-06-0013-36-Fr.doc, par.75


Article publié par le CGIC (Centre Catholique International de Génève) en juin 2005. Site: http://www.ccig-iccg.ch/pdf/CCIG7.pdf

samedi 16 août 2008

Jeunes travailleurs à contre-courant ...


Les jeunes travailleurs à contre-courant
de la globalisation capitaliste
Reginaldo Andrietta
La mondialisation est un phénomène évoqué comme actuel, mais elle a des étapes qui précèdent notre époque. L’histoire démontre qu’elle s’est implantée progressivement. Ses caractéristiques sont multiples. Elle englobe tous les aspects de la vie humaine, mais a indéniablement et de manière prépondérante un caractère économique. Dans son étape actuelle elle est guidée par des critères capitalistes néolibéraux. Les travailleurs, surtout les jeunes, sont victimes de ses conséquences catastrophiques. Ils réagissent en prônant une autre mondialisation. Est-ce envisageable ? Les membres actifs de la Jeunesse Ouvrière Chrétienne Internationale (JOCI) y croient. Par leurs actions, ils sont à contre-courant.[1]

Les dessous de la mondialisation
Dans son stage primitif, la vie en société a consisté en des groupes de personnes, des tribus, centrées sur elles mêmes. Les relations entre les tribus se sont développées surtout à partir d’un intérêt matériel. Parallèlement à la compétition pour maîtriser certaines ressources naturelles, est apparue l’économie de troc.

Dans une étape plus avancé, la monnaie est apparue comme instrument de troc. La vie en société a évolué vers des «royaumes». La relation entre eux se basait spécialement sur le commerce. L’économie fondée sur l’accumulation de biens et d’argent a trouvé comme allié un système de défense armé. Les avancées technologiques se faisaient en fonction de besoins économiques et militaires. Un royaume a commencé à en dominer d’autres. Les empires ont montré leur visage.

Vers la fin du Moyen Age les royaumes établis en Europe ont investi dans la conquête de nouveaux territoires où ils ont créé des colonies, exploité intensivement des ressources naturelles, utilisé de la main d’œuvre esclave, implanté des modèles politiques, économiques et culturels favorables aux métropoles.

L’accumulation du capital en Europe et l’ouverture des nouveaux marchés ont déclanché la révolution industrielle. La bourgeoisie, au pouvoir grandissant, a soumis l’aristocratie à ses intérêts et a généré de nouveaux systèmes politiques. Les nouveaux états sont devenus propulseurs et gardiens de l’économie libérale.

La révolution nord-américaine de 1776, contre la couronne anglaise, et la révolution française de 1789, ont déclenché un «mouvement libertaire» qui a beaucoup influencé le monde. Le libéralisme est devenu la base idéologique de l’économie. La propriété privée a reçu le «statut» de droit naturel. La science s’est mise au service du développement technologique, lui-même allié à la production industrielle. La commercialisation intensive des produits industrialisés sur le plan international a ouvert la porte du paradis aux adorateurs du capital.

Le capitalisme libéral a créé un océan d’opportunités, mais il a montré tout de suite aussi ses contradictions: migration massive de la campagne vers les villes, conditions inhumaines de travail, chômage, excessive demande d’emploi en faisant pression pour que les salaires reste très bas, mauvaises conditions sanitaires, enfin, misère généralisé.

Les théoriciens du capitalisme, dont Adam Smith, philosophe et économiste écossais de la moitié du 18ème siècle, ont essayé de justifier ce modèle économique en affirmant que son fonctionnement suivait des «lois naturelles». Mais, Adam Smith, lui-même, a soulevé ses contradictions : «La rapacité cruelle et l’esprit monopolisateur des manufacturiers et marchandeurs font penser que les uns et les autres ne devaient certainement pas être les guides de l’humanité. Aucune société ne pourra être florissante et heureuse si la majorité qui la compose est pauvre et misérable ». [2]

Il s’agissait du libéralisme sans l’intervention de l’Etat, qui n’a pas produit le résultat attendu : les monopoles ont annulé la libre concurrence, l’abîme entre riches et pauvres a grandi, le chômage et la misère sont arrivés à des niveaux extrêmes. Les ouvriers ont réagi et ont obtenu des gains sociaux et quelques lois du travail. Avec la grave crise de 1929 la bourgeoisie a conclu qu’il fallait changer certaines «règles du jeu». A ce moment, est apparu John Maynard Keynes (1883-1946), économiste anglais, qui, réfutant l’œuvre de Adam Smith, jugeait nécessaire l’intervention de l’Etat pour pousser l’investissement, assurer le «plein emploi» et la distribution équitable du profit.[3]

Avec Keynes le capitalisme est entré dans une période de rêves. Ses idées ont été utiles pour que les pays riches puissent se récupérer de la crise surtout après la 2ème Guerre Mondiale. L’importance donnée au rôle des Etats a favorisé la création de l’Organisation des Nations Unies (ONU). Fondée officiellement en 1945, elle est devenue le centre nerveux du système institutionnel mondial. Elle s’est mise à réglementer certains aspects des relations internationales et à essayer de régler les conflits entre nations. Dag Hammarskjöld, son secrétaire général de 1952 à 1961 a affirmé que «L'ONU n'a pas été créée pour conduire l'humanité au paradis mais pour la sauver de l'enfer».

Après l’enfer des deux guerres mondiales est survenu l’enfer de la «guerre froide». Au commencement des années 70, la situation du monde est devenue encore plus infernale avec une nouvelle crise du capitalisme mondial, engendrée surtout par la chute de la productivité et la montée des prix du pétrole. L’intervention des Etats dans l’économie n’a pas pu éviter cette crise. C’est à ce moment qu’a pris fin le keynésianisme et qu’est entré en scène le néo-libéralisme.

Le néo-libéralisme prône la diminution de l’Etat, puisque celui-ci aurait épuisé son rôle. Un monde sans frontières, globalisé et la liberté totale de marché sont ses valeurs maximales. Démiurge d’une ère qui serait arrivée, le marché libre de tout contrôle et de tout protectionnisme exercé par l’Etat, serait le moteur d’un monde globalisé et d’une révolution scientifique et technologique capable d’allouer ressources mondiales d’une forme plus efficace, de manière à promouvoir le bien-être de l’humanité.[4]

Il fallait utiliser certains mécanismes pour appliquer les politiques néo-libérales. Les Etats les plus riches du monde, les plus intéressés à pousser ces politiques, disposaient déjà de certains mécanismes du système financier international entre autres la Banque Mondiale (BM) et le Fonds Monétaire International (FMI). Les Etats surendettés ont été conditionnés par la BM et le FMI à appliquer les Programmes d’Ajustement Structurel. Ces programmes ont eu pour but d’éliminer le contrôle de l’Etat sur les activités économiques, sur les relations de travail, sur l’environnement,… et de diminuer son rôle de prestataire de services sociaux. Il fallait tout privatiser.

A partir de la fin des années 80, l’affaiblissement et, finalement, le changement de cours du bloc socialiste, ont favorisé l’affermissement de l’idéologie néo-libérale. Le contexte global des années 90 est devenu très favorable aux politiques néo-libérales. Tout semblait tourner autour du «Consensus de Washington». Cette expression a été utilisée en 1989 par l’économiste américain John Williamson pour désigner les dix recommandations à l’usage des Etats «désireux» de réformer leurs économies. Il s’agissait des «10 commandements» néolibéraux qui portent le nom de la capitale de la nation la plus impériale de l’actualité.

L’ordre économique, politique et culturel du monde actuel tourne autour des Etats-Unis et d’autres pays qui composent le «Groupe de 8», c’est-à-dire, les huit pays les plus riches du monde. Mais, il faut savoir qu’au dessus de ces Etats, les acteurs les plus importants sur la scène internationale sont les corporations transnationales. Les pays les plus riches et les transnationales utilisent et manipulent à leur profit l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC). L’OMC fixe et régit les règles relatives au commerce mondial, veillant à la «libre» circulation des biens et des capitaux. Elle contrôle actuellement presque 100% du commerce mondial.

Le pouvoir accru des corporations transnationales entraîne une impuissance de plus en plus grande des gouvernements de tous les pays du monde et des toutes les institutions internationales dont les Etats nationaux sont partie prenante. La disparité entre le revenu brut des principales transnationales et le Produit National Brut de la majorité des pays est énorme. Cela démontre la vulnérabilité des Etats et de ses institutions internationales par rapport aux politiques menées par ces corporations. Les décisions prises par les Etats sont trop conditionnées directement et indirectement par les intérêts de ces corporations.

L’investissement des corporations est devenu objet de concurrence entre les Etats. Ceux-ci bafouent eux-mêmes les droits fondamentaux des leurs populations, spécialement des travailleurs, afin de favoriser l’investissement des corporations transnationales. Cela se passe dans les pays capitalistes et ceux dits communistes. La Chine est un cas typique. On pourrait supposer que son orientation communiste devrait la rendre indépendante des centres de pouvoir capitalistes et aussi respectueuse des droits des travailleurs. Loin s’en faut ! L’Etat chinois s’est marié lui aussi dans les dernières années avec les corporations transnationales.

L’atrocité de la mondialisation, spécialement pour les jeunes

La mondialisation est devenue au fil de l’histoire un système fondé sur le marché global. Tout est soumis à la loi du marché. C’est un totalitarisme qui porte en soi des contradictions profondes. L’histoire fait preuve de l’exploitation, de l’esclavage, de l’exclusion, de la misère, de la violence,… et enfin de l’oppression et du massacre, des individus et de peuples, soumis aux mécanismes de la mondialisation. Malgré les tentatives actuelles de déguisement, l’atrocité de ces mécanismes n’a pas son pareil dans l’histoire.

Aujourd’hui, «842 millions d’êtres humains vivent en situation de dénutrition chronique. Les statistiques parlent de 100.000 morts par jour à cause de la faim, parmi lesquels 30.000 enfants de moins de cinq ans. Plusieurs tours jumelles chaque jour».[5] Le monde n’a jamais produit autant de richesse qu’aujourd’hui, mais il n’a jamais produit non plus autant de misère.

Le chômage atteint aujourd’hui des taux record. L’Organisation Internationale du Travail (OIT) estime à 185,9 millions le nombre de personnes sans emploi dans le monde. Le chômage s’aggrave parmi les jeunes. Il n’y a jamais eu avant autant de gens cherchant du travail ou vivant dans la pauvreté, en particulier des jeunes.[6] En juillet 2003, le secrétaire général de l'ONU, M. Kofi Annan déclarait: “Nous avons besoin de créer près d'un milliard d'emploi pour les jeunes”.[7]

Cette quantité de personnes sans emploi correspond aux chiffres officiels. Mais le taux est sûrement plus haut si l’on considère qu’une grande partie des sans emploi trouvent leur survie dans l’économie informelle. Une étude réalisée par la Jeunesse Ouvrière Chrétienne Internationale (JOCI)[8] a montré que plus de 25% des travailleurs du monde (500 millions de personnes, sans compter le travail des enfants) sont actifs dans l’économie informelle.

Dans beaucoup des pays le secteur informel est devenu plus important que le secteur formel. Il atteint 92% en Inde et 62% au Bangladesh. En Afrique, 2 habitants des villes sur 3 gagnent leur vie dans le secteur informel. Sur un milliard de gens de ce continent, 800 millions survivent grâce à l’économie informelle. Il s’agit aussi d’un phénomène grandissant dans les pays post-industrialisés. Les lois ne protègent pas les travailleurs de l’économie informelle. Par conséquent, ils n’ont aucune protection sociale ni d’organisation pour les représenter et défendre leurs droits. Les «travailleurs immigrés sans papiers», des jeunes surtout, obligés de travailler dans l’informalité, sont particulièrement vulnérables.

Les politiques néo-libérales poussent à la flexibilisation des lois du travail. Cela génère une perte des droits acquis par les travailleurs en matière de négociation collective, de stabilité d’emploi, d’horaires de travail, de protection sociale, etc. Les transnationales utilisent surtout les zones franches où la légalité est mal définie, pour limiter leurs coûts de production. Ce sont surtout des femmes qui y travaillent. Les grandes entreprises utilisent le système de sous-traitance pour diminuer le coût de la main d’œuvre et se soustraire à leurs responsabilités envers les travailleurs. Le travail intérimaire, de courte durée, augmente.

La précarité des conditions de vie, de travail et de citoyenneté a aussi un lien avec le «genre». Malgré les progrès faits par la société en relation avec les droits de femmes, celles-ci sont encore très discriminées. Dans beaucoup des pays, elles n’ont pas l’égalité des chances pour étudier, trouver un emploi ou se placer dans des postes politiques. Beaucoup de jeunes femmes sont engagées comme femmes de ménage, «baby-sitters» et autres boulots qui ne leur donnent pas la chance d’accéder à une carrière professionnelle. Beaucoup sont harcelées, battues et violées.

Défis aux nouvelles générations de travailleurs
Nous nous trouvons dans un moment historique plein de défis surtout pour les nouvelles générations de travailleurs. Le monde devient un village. Le capital se délocalise de façon rapide à la recherche de sa croissance. Les conditions des vies se précarisent. Le fossé entre riches et pauvres s’accentue. L’instabilité se généralise. La culture se massifie. La compétition s’exacerbe. Le conflit se répand. La violence transvase. Les jeunes se trouvent sans perspectives.

La frustration des jeunes travailleurs est bien répandue. Nonobstant, ils sont nombreux ceux qui cherchent des alternatives à la mondialisation conduite selon les critères capitalistes. Les alter mondialistes, parmi lesquels se trouvent beaucoup des jeunes, croient et crient qu’ «un autre monde est possible». Les espaces de débat et d’échange d’expériences d’actions entre mouvements sociaux se multiplient. Les visions sur un nouvel ordre mondial fleurissent.

Le centre d’attention est l’ordre économique. C’est ici que se situe le plus grand défi. Y aurait-il une alternative au modèle capitaliste pouvant garantir un développement durable, et l’universalisation du bien être ?

On entrevoit la réponse dans les activités économiques à caractère solidaire : les coopératives, le commerce équitable; dans les «codes de conduite» qui obligent les entreprises qui veulent placer leurs produits sur le marché international à respecter les droits des travailleurs. Les conventions internationales deviennent aussi de plus un plus des instruments de régulation des activités économiques, politiques et culturelles. Les travailleurs apprennent à faire usage du système institutionnel international, surtout en ce qui concerne les principes et droits fondamentaux au travail prévus par l’OIT. L’universalisation de la protection sociale[9] ainsi que la liberté d’association sont de plus en plus revendiquées.

L’action des jeunes travailleurs

L’économie capitaliste s’est mondialisée, les actions en vue d’une autre mondialisation aussi. Au moment où le capitalisme industriel a pris une grande envergure en Europe et à posteriori dans tous les continents, la scène internationale a vu naître une organisation des jeunes travailleurs avec une vocation libératrice, la Jeunesse Ouvrière Chrétienne Internationale (JOCI). Cette organisation a commencé en Belgique au début du 20ème siècle, à l’initiative de Joseph Cardijn, un jeune prêtre issu de la classe ouvrière. Elle s’est répandue dans le monde, en étant présente dans une centaine de pays. Elle compte aujourd’hui plus de 20.000 membres actifs.[10]

Il s’agit d’une organisation autonome, dirigée par les jeunes travailleurs eux-mêmes. L’émancipation des travailleurs défendue par la JOCI y compris son autonomie en tant qu’organisation des jeunes travailleurs, est une caractéristique profondément révolutionnaire. Elle développe la formation des jeunes travailleurs par l’action en appliquant la méthode «Voir-Juger-Agir» - crié par elle - et en utilisent des instruments pédagogiques qui permettent aux jeunes de découvrir et d’analyser leur situations de vie, de définir leurs critères de jugement de la réalité, de bâtir leur vision sur la façon de vivre en société, de planifier leurs actions et d’agir collectivement entre eux et avec d’autres organisations en faveur de leurs droits et du bien commun. La révision de vie et d’action faite en équipe de façon permanente leur permettent d’identifier les contre-valeurs inculquées par leurs environnements sociaux et d’affirmer des nouvelles valeurs.

La «Tache d’Education de la JOCI» est conçue comme une «tache révolutionnaire». Tout au long de son histoire, la JOCI a réalisé des actions pour que les jeunes travailleurs et les travailleurs en général puissent être reconnus comme porteurs de droits. Elle lutte pour que tous les jeunes travailleurs puissent vivre en accord avec leur dignité personnelle et collective, trouver un sens à leurs vies et avoir des conditions objectives et subjectives pour que la vie se manifeste dans toute sa plénitude.

Cette utopie est fortement liée à la foi chrétienne. La vie est au centre du projet divin. Les jeunes travailleurs qui luttent en faveur d’un nouvel ordre mondial vivent l’utopie de la manifestation pleine du Royaume de Dieu. La JOCI lutte contre les systèmes qui s’absolutisent, qui se sacralisent. Pour la JOCI, le droit à la vie est médiatisé par le droit fondamental à un travail digne. C’est pour cela qu’elle mène actuellement une campagne internationale «Pour un travail juste pour tous et toutes ». Le droit au travail ne signifie pas uniquement le droit à l’emploi. L’emploi suppose un contrat formel qui donne une certaine sécurité au travailleur, mais cela ne suffit pas si le travailleur reste soumis à des conditions d’exploitation et que son travail n’accomplit pas une fonction sociale.

Le champ d’action prioritaire de la JOCI est la réalité des jeunes sans emploi, des jeunes travailleurs dans l’économie informelle, de jeunes qui travaillent des conditions précaires, et des jeunes travailleuses. Les actions menées au niveau local et national sont nombreuses. Elles sont articulées au niveau international au tour de la revendication, du lobbying et du plaidoyer des leurs droits auprès des institutions qui font partie du système institutionnel international, surtout l’OIT.

La JOCI revendique un rôle prépondérant pour l’Etat dans la conduite économique. Elle prône une gouvernance basée sur un modèle de démocratie qu’assure une distribution équitable des richesses. Elle considère que la mondialisation actuelle est néfaste, raison pour laquelle il faut la réorienter pour répondre aux critères sociaux, environnementaux et éthiques. Une gouvernance globale est plus que jamais nécessaire. Elle est en train de se bâtir avec les nouvelles générations de travailleurs y compris les exclus du monde du travail, touchés par l’action de la JOCI et d’autres organisations.

Une gouvernance globale réussirait-elle à orienter une nouvelle mondialisation ? Finalement, une nouvelle mondialisation, différente de la mondialisation capitaliste, est-elle faisable ? Ceux qui veulent conserver leurs privilèges ainsi que les fatalistes disent non. Ceux qui sont guidés par la dignité et la potentialité des êtres humains tiennent un discours autre et agissent à contre-courant.

[1] Observation préliminaire : Quand je me réfère ici aux «jeunes travailleurs» je veux dire aussi «jeunes travailleuses». L’utilisation du masculin n’est pas limitative et inclut le féminin.[2] Iriarte, Gregorio. Neoliberalismo – Sim ou Não? Ed. Paulinas, São Paulo, 1995, p. 14.[3] Cf. Ibid., p. 14.[4] Cf. Sourza, Nilson Araújo de. O colapso do Neoliberalismo. Ed. Global, São Paulo, 1995, p. 17.[5] Frei Betto. DIAL – Diffusion de l’information sur l’Amérique Latine, Lyon, 1-15 avril 2004, Br110. Les tours jumelles mentionnées ici sont celles de New York, détruites le 11 septembre 2001.[6] Cf. International Labor Organisation. World of work, n˚ 50, March 2004.[7] Source : OIT: Organisation Internationale du Travail.[8] JOCI, Aux confins de la société, les Jeunes Travailleurs du Secteur Informel, 1999, page 10.[9] L’OIT reconnaît que 80% de la population mondiale ne dispose d’aucune protection sociale.[10] Informations sur la JOCI : www.jociycw.net

Article publié dans la Revue Internationale de Catéchèse et de Pastorale « Lumen Vitae », vol. LX, n° 1, Bruxelles, mars 2005.